Les montagnes russes

J’adore ce manège.  En fait, c’est un de mes préférés.  Se faire brasser la cage, ne pas trop savoir où on s’en va, de longues remontées qui nous semblent interminables tellement on a hâte de descendre la pente à toute vitesse! Le hic c’est que depuis près de trois ans, ma VIE est une montagne russe. Pas mal moins amusant que le manège par contre.

Parce que quand tu vis avec un petit soleil, tu te fais brasser la cage assez souvent. Les valeurs que tu veux inculquer, ta façon d’éduquer, ton plan du jour… tout fout le camp. Souvent. C’est comme si, voyant que le rail devant toi tourne à droite, tu te préparais à aborder ce virage en plaçant bien tes appuis mais que soudainement, à la dernière milliseconde, ton bolide tourne à gauche.  Essaie de rester en équilibre voir… Y’a de fortes chances que tu bascules, légèrement ou fortement selon le degré de surprise et l’intensité de la courbe, avant de réussir à te re-stabiliser.

Je disais que ma vie est une montagne russe car depuis que mon fils est diagnostiqué (et surtout, depuis que les symptômes ont pris une ampleur importante), j’ai remarqué une sorte de cycle comportemental. Par contre, je n’ai pas encore réussi à mettre la main sur la série d’éléments qui déterminent la durée du cycle ou encore ce qui donne le GO pour passer à la prochaine étape du parcours. Par moment, je suis dans la pente ascendante. C’est calme, rassurant, le rythme est plus lent. J’ai le temps de voir venir les choses et de réagir rationnellement. Je ne suis pas débalancée; mes pieds sont bien ancrés et mes appuis solides. Et on vogue sur cette belle montée pendant un certain temps. De quelques jours à généralement quelques semaines. Dernièrement, j’ai même eu droit à une magnifique et extraordinaire montée d’un mois et demi! Du jamais vu! Une sorte de paix intérieure s’installe. Les sourires et les fous rires deviennent plus faciles. Le goût de jouer et la complicité avec mon petit soleil connaissent un regain franchement agréable. Et entendons-nous, même dans les montées, ça brasse un peu, mais toujours de façon raisonnable, en ne quittant jamais la ligne directrice, bien droite, pointant le ciel bleu.

Mais inévitablement, avec toute ascension vient une descente. Quoiqu’aussi vigoureuse et déstabilisante, celle-ci est beaucoup moins agréable que celle du manège. Tout à coup, sans vraiment savoir pourquoi, les réactions deviennent plus vives, la colère reprend une place prédominante et la patience et la raison prennent une solide débarque. La médication qui semblait magique nous rappelle qu’elle ne l’est pas. La réalité nous rattrape et c’est maintenant à notre tour de faire opérer la magie des enseignements reçus sur le fonctionnement du cerveau. Il faut alors se métamorphoser en Casque bleu et tenter de désamorcer ce terrain miné qui risque de faire exploser toute la maisonnée. La tâche est ardue, la pente aride, mais si on trouve la force d’y mettre tous les efforts possibles, on pourrait bien remonter la pente plus rapidement que prévu. Il faut tenter de se rappeler tous les efforts que notre petit soleil fait à chaque jour, à chaque minute même pour être à la hauteur des attentes de la famille, des amis, des professeurs et de cette grosse société conformatrice, éradiqueuse des différences et médisante de l’adversité. S’il arrive à surmonter tous ces obstacles au quotidien, je dois au moins être en mesure de comprendre sa fatigue et m’efforcer de recharger ses batteries avec ma compassion, ma patience et mon amour.

Alors aussi difficile que ce soit, il est temps de repositionner rapidement mes appuis, de les solidifier à coup d’assurance en moi et de regarder cette descente comme une opportunité pour apprendre à mon fils comment gérer ce sentiment de peur et d’instabilité. De lui montrer que la peur, la déception et la tristesse sont normales et même fréquentes en petites doses au quotidien. Mais qu’avec un peu de pratique, lui aussi arrivera à se repositionner pour retrouver l’équilibre et affronter calmement et en confiance les aléas de la vie. Car même quand notre bolide descend à toute vitesse et nous brasse de tout bord tout côté, on peut demeurer confiant car on est bien attaché et rien de grave ne peut nous arriver. Faut juste apprendre à prendre de grandes respirations et à laisser le temps faire son œuvre en sachant que tout finit toujours par passer et qu’une autre belle remontée nous attend au bout du prochain tournant.

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